Voix off : Nous sommes à Paris, 16 rue de la Faisanderie, bienvenue dans un musée unique au monde, le Musée de la contrefaçon, créé par l'union des fabricants. Ici, on y explique les mécanismes de la contrefaçon, les dangers qu'elle représente et les moyens mis en œuvre pour la combattre. La contrefaçon est un fléau qui concerne tous les consommateurs et touche tous les secteurs d'activité, des articles de luxe aux médicaments en passant par les pièces détachées automobiles et les produits de consommation courantes.
Ce phénomène mondial est mal connu et mal compris du grand public car il repose sur la violation de la propriété intellectuelle. Mais, la propriété intellectuelle au juste, c'est quoi ?
Julie Zerbib (INPI) : La propriété intellectuelle, c'est l'ensemble des droits exclusifs qui sont accordés sur les créations intellectuelles. Ça va permettre aux inventeurs, aux entreprises et aux créateurs de contrôler l'utilisation de leurs créations et d'en tirer des bénéfices, ce qui va favoriser la créativité et l'innovation.
Le droit de la propriété industrielle va s'appliquer quand on va parler de marques, brevets et dessins et modèles. Les marques permettent d'identifier l'origine commerciale des produits et services qui sont proposés par l'entreprise. Le brevet va permettre de protéger et de valoriser une création, une solution technique qui est développée par l'entreprise et le dessin et modèle va venir protéger l'apparence esthétique d'un produit.
On va parler en revanche de propriété littéraire artistique et donc de droit d'auteur quand on va parler d'œuvres artistiques, d'œuvres musicales et bien sûr de logiciels.
Voix off : Dans l'imaginaire collectif, les contrefaçons sont des articles qui ne sont pas bien faits. En réalité, comme le prouvent les objets exposés dans ces espaces, les contrefacteurs s'emploient à donner l'illusion et tromper les consommateurs avec des produits bas de gamme, parfois vendus au prix du vrai.
Le marché de la seconde main y est particulièrement confronté. La contrefaçon ne se limite pas à l'image de simples copies de vêtements ou d'accessoires. Elle touche désormais tous les types de produits, y compris ceux qui peuvent avoir un impact direct sur la santé et la sécurité.
Les médicaments falsifiés, avec des pilules contenant des substances inefficaces, voire toxiques. Les produits cosmétiques, contenant des composantes allergènes-cancérigènes. Les pièces détachées automobiles et aéronautiques, qui peuvent provoquer des accidents graves.
Les jouets et équipements électroniques, dont le nom restait des normes de sécurité, présentent des risques d'incendie ou d'intoxication. Les risques vont au-delà de la santé individuelle. La contrefaçon est également une menace pour l'économie et la société.
Christophe Blanchet (CNAC) : C'est près de 7 milliards d'euros d'économies qui n'atterrissent pas dans les entreprises qui innovent, qui inventent, qui créent en France, sur notre territoire.
Catherine Dumas (CNAC) : Il faut savoir que la contrefaçon est très liée au réseau criminel, au réseau mafieux, qui sont ceux du terrorisme, qui sont ceux de la drogue, qui sont ceux aussi d'exploitation des personnes et que cet argent part dans ces réseaux.
Voix off : Aujourd'hui, les autorités publiques, notamment la douane, les politiques et les entreprises mènent un combat quotidien contre la contrefaçon.
Mais la tâche est de plus en plus ardue. La contrefaçon est fragmentée et suit des circuits de distribution de plus en plus complexes.
Valérie Brochet (Douanes) : On assiste ces dernières années à une mutation du commerce international avec un essor spectaculaire du commerce en ligne qui conduit à une parcellisation croissante des colis qui se comptent en millions à l'échelle française.
En 2024, c'était 800 millions de petits colis sur des plateformes toujours plus nombreuses sur lesquelles les échanges peuvent se faire à travers la planète. Aujourd'hui, le fret express et postal est devenu le vecteur principal de saisie de contrefaçon au niveau européen. Les vendeurs développent un certain nombre de stratégies pour toucher de plus en plus de clients et en essayant d'éviter les contrôles.
Cela complexifie bien sûr le travail des douaniers mais nous adaptons nos objectifs, nos méthodes de travail. On observe ces derniers temps une diversification des pays de provenance avec le développement de productions de contrefaçon plus locales dans l'Union européenne ou aux portes de l'Union européenne. Ces productions plus locales sont fabriquées à partir de produits qui arrivent de façon non finie, avec des morceaux qui arrivent dans différents endroits de l'Union européenne et qui rejoignent des ateliers d'assemblage où des flacons, des emballages, des étiquettes de produits, des contenants sont assemblés pour fabriquer les produits contrefaisants finis.
Voix off : Avec l'essor du commerce en ligne et des nouvelles technologies, les trafiquants ont trouvé de nouvelles méthodes pour contourner les contrôles et commercialiser leurs contrefaçons. Notamment en utilisant un tout nouveau champ lexical, comme celui des dupes, qui a explosé ces dernières années auprès de la jeune génération et notamment dans les secteurs de la mode, de la cosmétique et des produits luxe.
Delphine Sarfati (Unifab et GACG) : Les contrefacteurs ont trouvé un nouveau champ lexical pour faire croire aux consommateurs qu'acheter un dupe ce n'est pas acheter une contrefaçon.
Or, un dupe, c'est la copie d'un produit original et ce n'est rien d'autre que de la contrefaçon. Ce phénomène est arrivé par les influenceurs qui ont d'abord proposé des dupes de parfum puis de cosmétique et aujourd'hui il atteint tous les secteurs d'activité. Il faut savoir qu'acheter un dupe, c'est comme acheter une contrefaçon, c'est illégal et c'est vraiment profiter de la notoriété et des investissements d'une marque pour vendre des produits qui sont bas de gamme, de mauvaise qualité et qui vont nuire à la santé du consommateur.
Voix off : La contrefaçon, on le voit, a pris une place colossale dans l'économie mondiale. Il est urgent de mieux la comprendre et d'intensifier la lutte contre ce fléau qui menace l'innovation, la sécurité et la stabilité économique. Le combat contre la contrefaçon ne concerne pas seulement les autorités ou les marques, mais bien tous les citoyens.
Il est crucial de sensibiliser les consommateurs aux dangers et aux impacts de la contrefaçon. C'est d'ailleurs ce que propose ce musée toute l'année.